Un moulin à papier installé au fil de l'eau possède au minimum une unité de production consistant en un mécanisme et une cuve. On y emploie 8 à 12 ouvriers et ouvrières. L’équipe qui travaille autour de la cuve comprend 4 et 5 personnes.
Depuis 2004, l’AVPPS organise tous les ans (en juin) la randonnée « la route du papier ». Il s’agit de se remémorer les moulins et les nombreux papetiers des vallées de la Virène et de la Dathée. Les itinéraires varient chaque année, mais restent fidèles au Bocage. Les marcheurs sont toujours accompagnés d’ânes dits « bâtés », ils rappellent les collecteurs de chiffons qui leurs faisaient porter les " drapeaux " de lin et de chanvre : vêtements, draps, voiles de bateau, cordages... Les chiffonniers amassaient tout ce qui entrait dans la composition de la pâte à papier. En Noues de Sienne, un site s'impose : celui des Ritours à Champ-du-Boult. On y comptait cinq moulins, il en reste deux, ainsi que des vestiges de l’industrie papetière : auges à maillets, conduites d’eau, canaux de dérivation. Le tout en granit évidemment ! Un patrimoine incontournable de la route du papier.
Du Bocage à la plume de Shakespeare
L'activité papetière d'autrefois est dispersée sur tout le territoire français. La Normandie est l'un des quatre grands pôles traditionnels. Durant le XVIIe siècle, les feuilles confectionnées dans le Bocage furent expédiées de Caen à Londres et d'Amsterdam à Moscou. Une riche documentation montre une forte concentration de moulins à papier dans le Bocage normand, entre Vire et Mortain, dans le sud des départements du Calvados et de la Manche, et dans l'ouest de l'Orne, entre le XVIe et le XIXe siècle. Les premières œuvres de Shakespeare ont été imprimées sur du papier de la région ! Durant cette période, les détritus de textile sont l'unique matière première envisagée pour fabriquer feuilles et cartons. C'est sans doute en rapport avec l'activité textile de la région. Dans un Mémoire de 1731, Roussel de Fontanelle subdélégué dans l'élection de Vire, note que "la manufacture des draps de Vire [...] est celle de toute la Généralité de Caen où il se fabrique le plus de draps". La manufacture de papier est relativement concentrée le long de cours d'eau dont les dispositions naturelles sont favorables. L'eau constitue à la fois la force motrice et un composant de la pâte à papier. Les fabricants d'étoffe font une grande consommation de papier d'emballage, une des spécialités des moulins à papier du Bocage. On comprend comment ce pays de petites propriétés agricoles (les patrimoines sont divisés) au terroir impropre à la culture des grains, a pu fournir une main d'œuvre abondante à l'industrie du textile et à celle du papier. Les habitants à la recherche d'un complément de revenus se tournaient vers ces manufactures.